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Lanceurs d’alerte – Parution du décret d’application de la loi Waserman

Pauline Dufourq est avocate au barreau de Paris. Elle est spécialisée en droit pénal. Elle intervient essentiellement sur des contentieux techniques et transfrontaliers notamment en droit pénal des affaires ou encore en droit pénal de l’environnement aux côtés de dirigeants d’entreprises ou de sociétés. Elle conseille régulièrement des entreprises sur la conformité anticorruption et sur le devoir de vigilance des multinationales.

Tom Bruneau est juriste au sein du cabinet Soulez Larivière Avocats. Il est spécialisé en droit pénal, et intervient principalement dans des dossiers de droit pénal des affaires et de conformité en droit interne ou ayant une dimension transnationale. Il participe également au traitement de signalements éthiques dans le cadre d'enquêtes internes.

 

Le 22 mars dernier paraissait au Journal Officiel la loi n° 2022-401 visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte, dite « loi Waserman ». Cette loi, adoptée dans le cadre de la transposition de la directive européenne du 23 octobre 2019, est venue renforcer le régime de protection des lanceurs d’alerte, tout en simplifiant la procédure de signalement.


Parmi les principaux apports de cette loi figuraient l’élargissement de la définition des lanceurs d’alerte, ainsi que l’élaboration d’un statut au bénéfice des « facilitateurs » ; c’est-à-dire les membres de l’entourage du lanceur d’alerte, ayant apporté leur aide dans la réalisation du signalement ou la divulgation. Mais l’innovation majeure de la loi du 21 mars 2022 réside dans la refonte de la procédure de signalement, avec une simplification de l’architecture des canaux dont dispose le lanceur d’alerte pour signaler les faits litigieux.


C’est précisément dans ce dernier cadre que s’inscrit l’entrée en vigueur du décret n° 2022-1284 du 3 octobre 2022, ce dernier venant ainsi parachever la réforme de la procédure d’alerte, initiée en 2016 par l’adoption de la loi dite « Sapin II ».


Le décret, qui s’applique aux entreprises de plus de cinquante salariés et aux personnes morales de droit public employant au moins cinquante agents, précise avoir pour objet « la fixation des modalités suivant lesquelles sont établies les procédures internes de recueil et de traitement des signalements et les procédures de recueil et de traitement des signalements adressés aux autorités compétentes » ainsi que la détermination de « la liste de ces autorités ». C’est ainsi que le décret s’articule autour de deux chapitres respectivement consacrés aux procédures d’alerte interne, et aux procédures de signalement réalisées auprès d’une autorité externe.


S’agissant du canal interne, force est de reconnaître que l’entreprise ou l’employeur de droit public dispose d’une grande latitude dans la détermination des moyens à déployer afin d’élaborer la procédure de recueil des traitements et signalements qu’elle entend mettre en place. Cela résulte notamment de la notice accompagnant le décret du 3 octobre, laquelle dispose que « chaque entité concernée détermine l’instrument juridique le mieux à même de répondre à l’obligation d’établir une procédure interne de recueil et de traitement des signalements ». La seule exigence au stade de la mise en place de la procédure réside dans l’obligation faite à l’employeur de droit public ou de droit privé de consulter au préalable les instances de dialogue social.


Une fois élaborée, la procédure d’alerte interne doit être diffusée et rendue publique auprès des salariés ou des agents susceptibles de constituer des lanceurs d’alerte ; l’objectif étant d’assurer la « publicité suffisante » de la procédure, « dans des conditions permettant de la rendre accessible de manière permanente ».



https://act.wemove.eu/campaigns/lanceurs-dalerte


Le décret dispose également que la procédure interne de recueil et de traitement des signalements doit instaurer un canal de réception des alertes, lequel peut être soit oral ou écrit, étant précisé que si la procédure prévoit la possibilité d’adresser un signalement par oral, l’alerte peut être émise dans le cadre d’une conversation téléphonique, par messagerie vocale, par visioconférence ou à l’occasion d’une rencontre physique.


Par ailleurs, il résulte des dispositions de l’article 5 du décret que la procédure d’alerte interne doit indiquer les personnes ou les services habilités à recueillir les signalements. À cet égard, l’article poursuit en indiquant que « les personnes ou services désignés disposent, par leur positionnement ou leur statut, de la compétence, de l’autorité et des moyens suffisants à l’exercice de leurs missions », avant de conclure que « la procédure prévoit les garanties permettant l’exercice impartial de ces missions ».


En tout état de cause, il est impératif que les modalités de recueil du signalement garantissent l’intégrité et la confidentialité des informations communiquées. C’est ce qui résulte notamment de l’article 6 du décret, qui dispose que « La procédure garantit l’intégrité et la confidentialité des informations recueillies dans un signalement, notamment l’identité de l’auteur du signalement, des personnes visées par celui-ci et de tout tiers qui y est mentionné ».


Qu’il ait été émis à l’oral ou par écrit, l’employeur dispose d’un délai de sept jours ouvrés pour accuser réception du signalement. Après s’être assurée de la recevabilité du signalement au regard des conditions légales, l’entreprise ou l’entité publique dispose d’un délai de trois mois pour adresser un retour d’informations au lanceur d’alerte. À l’issue du traitement du signalement, l’auteur est ainsi informé par écrit des mesures de remédiation envisagées ou prises. La clôture du signalement peut également être réalisée lorsque le signalement est devenu sans objet, ou lorsque les allégations du lanceur d’alerte s’avèrent inexactes ou infondées.


Il peut enfin s’avérer opportun de préciser que le décret ouvre la voie aux groupes de sociétés pour mettre en place une procédure unique au sein du groupe. De la même manière, les entreprises de moins de 250 salariés ont la possibilité de mettre en commun leurs procédures de recueil et de traitement des signalements.


S’agissant de la procédure de recueil et de traitement des signalements par les autorités externes, cette dernière est en de multiples points similaire à celle ayant cours en interne.


Les autorités externes peuvent parfaitement être saisies par le lanceur d’alerte après que ce dernier a émis un signalement interne ; mais ce dernier n’est plus un prérequis indispensable à la recevabilité de l’alerte.


Dès lors, le salarié ou l’agent qui craint que son alerte occasionne des pressions ou des représailles à son encontre est fondé à réaliser directement un signalement externe auprès de l’autorité compétente.


À cet égard, la liste des autorités externes chargées de recueillir les signalements est établie en annexe du décret du 3 octobre.





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